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Représentant des PME

« Il faudrait que les banques prennent un peu plus de risques « contrôlés » »

Créé le

18.05.2017

-

Mis à jour le

24.05.2017

L’accès au crédit bancaire fonctionne bien mais des restrictions demeurent sur le crédit de trésorerie pour les TPE, estime la Confédération des PME (CPME). Elle appelle les banques à prendre davantage le temps d’accompagner ces clients, alors que les relations se sont améliorées depuis la crise.

Comment se porte le crédit aux TPE et PME aujourd’hui ?

Quand on parle du crédit aux PME, il faut vraiment distinguer le crédit d’investissement et le crédit de trésorerie, le besoin en fonds de roulement. Il y a une vraie dynamique du crédit à l’investissement, qui se retrouve dans les chiffres de la Banque de France. 94 % des PME obtiennent le crédit d’investissement demandé. Mais paradoxalement, nous avons connu un premier trimestre 2017 qui n’a pas été très bon, avec un creux pour les TPE et PME en matière de crédit de trésorerie. 66 % des TPE ont obtenu un crédit de trésorerie demandé, contre 70 % au trimestre précédent.

Certaines banques ont une politique plus contraignante pour les TPE en matière de crédit de trésorerie depuis la crise. Avec les contraintes prudentielles, elles le restreignent, car il est faiblement garanti et donc risqué, contrairement au crédit d’investissement. Le financement de l’immatériel, les besoins en fonds de roulement restent fragiles encore aujourd’hui.

Pourquoi la trésorerie des TPE-PME reste-t-elle fragile ?

Le niveau de fonds propres des entreprises s’est amélioré mais reste insuffisant. Il y a toujours des demandes de garanties supplémentaires de la part des banques, du fait de cette faiblesse des entreprises en fonds propres. Il y a aussi une difficulté en matière de délais de paiement et certains secteurs en sont pénalisés, comme le bâtiment, la restauration… Les délais de paiement sont un enjeu important. Ils représentent une perte de trésorerie de 16 milliards d’euros. Il faudrait réduire les délais de paiement, et s’ouvrir sur de nouveaux fournisseurs financiers pour les TPE, des FinTechs qui commencent à émerger sur ce créneau, dans la mesure où elles sont vertueuses et responsables. Mais à ce jour, il y a très peu de partenaires fiables, hors environnement bancaire, sur le soutien de trésorerie.

Que faire pour améliorer cette situation selon vous ?

Il faudrait que les banques prennent un peu plus de risques « contrôlés ». Cela est envisageable si elles améliorent le contact régulier avec l’entreprise, la connaissance des projets PME, leur rythme, et valorisent le métier de conseiller de clientèle. Aujourd’hui, il a hélas encore une certaine distance liée au fait que les chargés de clientèle n’ont pas le temps de répondre au besoin d’accompagnement des entreprises. Le pro – TPE, artisan ou commerçant – doit pouvoir avoir une vraie confiance dans son banquier. Il ne faut plus que l’entreprise considère le banquier comme un censeur, auquel on ne va pas dire toute la vérité, mais comme celui qui peut accompagner lors de choix complexes. Bpifrance propose de l’accompagnement, mais plutôt pour les belles PME. Et c’est une réussite. Les réseaux bancaires peuvent le faire d’une autre manière.

Il faut voir le bon côté des choses : nous avons tous appris de la crise que le plus important est de créer les conditions du dialogue et de travailler ensemble. Il reste à aider ces entreprises qui sont fragiles parce qu’elles connaissent « un » moment difficile mais ne sont pas en péril afin qu’elles retrouvent une relation bancaire saine de confiance. La confiance est très importante dans le climat des affaires.

Que pensez-vous des nouvelles sources de financement alternatif, du crowdfunding pour les PME, etc. ?

Nous avançons progressivement vers une atomisation des dispositifs. Aujourd’hui, nous avons une palette d’outils de financement des PME qui répondent aux besoins. La plupart restent destinés aux PME, mais demain ils pourraient être orientés vers les TPE. Le crowdfunding serait un atout fort s’il jouait effectivement un rôle de proximité. En réalité, il ne le joue pas vraiment et intervient paradoxalement là où les banques sont déjà présentes…

Aujourd’hui, il y a une embellie sur le capital investissement, ce qui est réconfortant. Mais il reste à développer la Bourse des PME pour garantir aux pépites la maîtrise de leur gouvernance. Espérons que la conjoncture européenne, avec le Brexit, et les changements politiques aideront à ce développement, pour une juste revalorisation de la Place de Paris.

Qu’attendez-vous, pour les TPE-PME, de la part d’Emmanuel Macron et du gouvernement ?

N’oublions pas que ce sont les entreprises de toutes tailles, et donc également les TPE et PME, qui sont les acteurs économiques de la croissance. Plus globalement, parmi nos priorités se trouvent la réforme du Code du travail, le RSI, ainsi que la simplification des règles et normes qui brident l'initiative entrepreneuriale. Il est également urgent de reprendre certaines questions telles que le dispositif de prévention de la pénibilité ou le prélèvement à la source, et ce avec une lecture pragmatique et réaliste.

Il conviendra aussi de faire adopter par le Parlement une loi-cadre TPE-PME retraçant les orientations de la « politique entreprise » que le gouvernement entend mener durant le quinquennat. Qu'il s'agisse par exemple de la transition numérique ou de la trajectoire du coût du travail ou de la fiscalité, il est en effet essentiel de donner de la visibilité aux entreprises. Et de la stabilité.

Enfin, continuons de nous engager résolument dans la dématérialisation des moyens de paiement.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº809