Le géant ICBC à l’attaque du monde
Industrial and Commercial Bank of China (ICBC), détenue à 70 % par l’État, est certainement l’exemple plus emblématique de la nouvelle puissance des groupes bancaires des pays émergents. Dès 2006, elle fait parler d’elle en devenant la plus grosse introduction en Bourse de l’histoire, avec 21,9 milliards de dollars levés entre Hong Kong et
Forte de cette solide base domestique mais aussi concurrencée au niveau national par d’autres établissements chinois, ICBC a pris le virage de l’international. Outre ses implantations asiatiques, allant de l’Inde à l’Indonésie, le mastodonte chinois a mis le cap depuis quelques années sur des destinations plus lointaines. Accompagnant le développement des relations Chine-Afrique, il a acquis en 2008 20 % de la sud-africaine Standard Bank. ICBC se tourne aujourd’hui vers les pays développés. L’ouverture d’une agence boulevard Haussmann a ainsi fait grand bruit dans le milieu parisien début 2011, alors que des établissements similaires étaient inaugurés à Bruxelles, Amsterdam, Milan et Madrid, le tout piloté depuis le Luxembourg. L’objectif est bien sûr de suivre la clientèle chinoise partout où elle va, mais aussi de favoriser les liens entre les entreprises chinoises et les marchés matures. En 2012, ICBC franchit une étape supplémentaire, et non des moindres : être la première banque chinoise à mettre un pied aux États-Unis dans le secteur de la banque de détail, grâce au rachat du réseau de 13 agences (Californie et New York) de Bank of East Asia.
Les implantations d’ICBC à travers le monde sont toutefois encore modestes à l’échelle d’un tel géant. L’agressivité de sa future stratégie d’expansion dépendra vraisemblablement de la santé de son activité domestique. Les risques liés à la distribution des produits d’épargne adossés au shadow banking, ainsi que l’éventuelle hausse des créances douteuses pourraient freiner les ambitions internationales du groupe. Dans le cas inverse, ses pions sont positionnés pour poursuivre sa diversification.
2012, année charnière pour Sberbank
En rachetant en septembre 2012 la pépite turque de Dexia, Denizbank, Sberbank, dont l’État russe est actionnaire à hauteur de 50 % et une voix, a beaucoup fait parler de lui en France. Si, à 3 milliards d’euros, cette acquisition était la plus importante de son histoire, l’établissement russe n’en est pas à son coup d’essai en matière d’internationalisation. Bien implantée en Biélorussie, en Ukraine et au Kazakhstan, Sberbank a acquis en février 2012 les activités à l’international de l’autrichienne Volksbanken (8 pays, 281 agences). Comme pour ICBC, cette expansion hors des frontières russes s’est appuyée sur la solidité de son activité domestique. Stéphane Barthélemy, gérant senior chez State Street Global Advisors, souligne que « Sberbank est la première banque en Russie, avec une part de marché près de deux fois supérieure à celle du deuxième acteur, VTB. En outre, le marché russe est un des plus dynamiques de l’Europe émergente, avec une croissance du volume de prêts attendue à 16 % en moyenne dans un marché non encore saturé. » En janvier 2012, Sberbank s’est par ailleurs diversifié sur le marché russe en achetant la banque de financement et d’investissement Troika Dialog, fondée il y a 20 ans par un Américain d’origine russe. Enfin, en septembre 2012, la banque a pris une participation majoritaire dans les activités de crédit à la consommation de BNP Paribas en Russie. Avec une part de marché – certes en déclin – de 46 % sur les dépôts russes, Sberbank a encore de beaux jours devant elle : elle vient de poursuivre son développement turc en rachetant les activités de banque de détail locale de Citigroup et regarde désormais vers l’Inde et la Chine, où elle n’est pour l’instant présente que via une agence (en Inde) et un bureau de représentation (en Chine).
Bradesco mise encore sur la croissance domestique
La banque à capitaux privés brésilienne Bradesco ne fait encore que peu parler d’elle à travers le monde. Mais dans un marché domestique en forte croissance, ce ne sont pas les opportunités de croissance organique qui lui manquent. Première banque privée du pays jusqu’à ce qu’elle soit détrônée par Unibanco lors de sa fusion avec Itau, Bradesco conserve des positions de leader sur une palette diversifiée d’activités, allant des cartes de crédit à l’assurance, en passant par la gestion d’actifs. À l’instar d’autres établissements bancaires, Bradesco a développé à moindre coût un vaste réseau de distribution reposant sur le principe des « correspondants bancaires », sorte de corners dans les supermarchés ou les bureaux de poste délivrant les services financiers de base. Le groupe en compte aujourd’hui 43 000, pour 4 700 agences. Il vient de perdre le partenariat de 10 ans qu’il entretenait avec la Poste brésilienne au profit de Banco do Brasil, mais peut toujours compter sur les 5 millions de clients qu’il a jusque-là
Standard Bank, porte d’entrée sur l’Afrique
Première économie du continent le plus prometteur, l’Afrique du Sud traverse toutefois une passe difficile, handicapée par l’inflation, une monnaie faible et des troubles sociaux. Le secteur bancaire, très concentré autour de quatre
ICICI, en bonne place pour la croissance future
Dans sa globalité, le secteur bancaire indien pèse bien moins lourd que celui de son voisin chinois. Similairement, ses banques sont moins puissantes que les établissements chinois et ne sont présentes dans le haut des classements ni en termes d’actifs, ni en termes de capitalisation boursière. La première banque privée du pays, ICICI, est aussi la seconde de l’ensemble du marché, très loin derrière State Bank of India. Mais contrairement aux établissements publics, ICICI a procédé à un nettoyage de son bilan ces dernières années, sous la houlette de sa présidente, Chanda Kochhar. Si la prudence reste de mise, ICICI se révèle malgré tout en bonne position pour profiter de la croissance du secteur bancaire indien, croissance indispensable pour accompagner le développement économique d’un pays qui sera bientôt le plus peuplé du monde. Or ICICI possède une forte base de banque de détail – avec un accent particulier mis sur les populations non ou peu bancarisées – sur laquelle elle pourra s’appuyer à l’avenir. Le tout dans un contexte de concurrence accrue : la banque centrale indienne vient en effet d’annoncer l’attribution prochaine de nouvelles licences bancaires, ce qu’elle n’avait pas fait depuis 10 ans. À l’international enfin, ICICI pourra compter sur sa présence dans 19 pays (dont le Royaume-Uni, l’Allemagne et la Belgique) et sur le partenariat qu’elle s’apprête à signer avec Ecobank, qui lui servira de hub pour son développement africain.