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Rétrospecvtive

Bilan annuel 2021 du droit bancaire

Créé le

15.12.2021

Zoom sur les principales lois et directives adoptées en 2021, en France et en Europe, ou en cours de négociation. Sans oublier les jurisprudences essentielles pour le secteur bancaire.

Thèmes généraux

Bâle 3 précisé par un paquet « bancaire »

Europe

C’est l’un des faits majeurs de l’année. Le 27 octobre 2021, a été publié le « paquet bancaire » visant à transposer en Europe l’accord de finalisation de Bâle 3, encore appelé Bâle 4, au grand dam des autorités. Ce paquet se compose pour l’essentiel :

– d’une proposition de règlement COM (2021) 664 final de 212 pages, modifiant le règlement (UE) n° 575/2013 dit CRR (Capital Requirements Regulation) ;

– d’une proposition de directive COM (2021) 663 final, modifiant la directive 2013/36/UE dite CRD (Capital Requirements Directive).

La mesure phare, la plus contestée par les banques européennes, notamment françaises, est l’instauration d’un plancher en capital (output floor) calculé au niveau consolidé. Selon cette règle, les actifs pondérés calculés selon les approches internes ne pourront pas être inférieurs à 72,5 % des actifs pondérés calculés selon les approches standards. Son application se fera de manière étalée entre 2025 et 2030. Un traitement plus favorable est prévu de manière transitoire, notamment pour les prêts immobiliers à faible risque.

En matière de surveillance et de gouvernance, le régime est renforcé par un ensemble de règles d’honorabilité des personnels dirigeants, des mesures accrues de surveillance des groupes fintechs et des règles de supervision harmonisées des succursales des groupes bancaires des pays tiers.

Enfin, est prévue une plus grande prise en considération des risques environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). Témoignage d’une certaine accélération sur ces sujets, l’Autorité bancaire européenne (EBA) devra rendre son rapport sur le traitement prudentiel de ces expositions en 2023, et non en 2025 comme prévu initialement.

 

Des évolutions pour les prêts non performants

Europe

La directive (UE) 2021/2167 du 24 novembre 2021 sur les gestionnaires de crédits et les acheteurs de crédit a pour objectif d’organiser un marché secondaire des prêts non performants de manière à permettre aux banques d’alléger leur bilan. Elle modifie des directives sur le crédit à la consommation (2008/48/CE) et le crédit immobilier (2014/17/UE) pour imposer aux prêteurs de disposer de « politiques et de procédures adéquates les incitant, s’il y a lieu, à faire preuve d’une tolérance raisonnable avant d’engager une procédure d’exécution ». L’idée d’une procédure extrajudiciaire accélérée de réalisation du collatéral a été abandonnée.

 

eIDAS et AML font cause commune

Europe

Le règlement eIDAS (UE) n°910/2014 sera révisé par une proposition de règlement COM (2021) 281 final du 3 juin 2021, en vue d’établir un cadre pour une identité numérique européenne. L’objectif est de fournir l’accès à des solutions d’identité numérique totalement sécurisées pour un usage transfrontières. Seront créés des portefeuilles européens d’identité numérique (wallets) qui devront être acceptés tant pour l’entrée en relation (vérification d’identité) que pour l’authentification forte dans les opérations de paiement. Le texte élargit les services de confiance numérique, notamment aux attestations électroniques d’attributs, qui couvriront les données bancaires et financières. Compte tenu de son impact sur le KYC, ce texte a été élaboré de manière coordonnée avec la proposition de règlement COM (2021) 420 final qui fait partie du « paquet AML ».

Ce paquet AML a été publié le 20 juillet 2021. Il est composé de quatre textes destinés à renforcer le système européen de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Les deux principaux textes sont :

une proposition de règlement COM (2021) 421 final créant une Autorité de l’Union européenne pour la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Elle assurera le rôle central d’un système intégré des autorités nationales et supervisera directement les entités financières les plus exposées aux risques de blanchiment et de financement du terrorisme ;

une proposition de règlement COM (2021) 420 final relatif à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins de blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme, qui va se substituer à l’actuelle directive (UE) 2015/849 pour instaurer un corps de règles uniques directement applicables dans les États membres, appelé Single EU Rulebook. Sont unifiées les exigences en matière de KYC et définis les attributs requis pour l’entrée en relation, ainsi que les règles en matière de recours à des tiers pour la mise en œuvre du devoir de vigilance.

 

Les sûretés rénovées

France

L’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés parachève la modernisation du droit français entamée en 2006. Elle s’appliquera à compter du 1er janvier 2022, sauf pour les dispositions nécessitant des décrets. Toutes les sûretés pourront désormais être conclues par voie électronique, ce qui permettra par exemple un parcours client « full on line » en banque de détail. Les règles du cautionnement, inchangées depuis 2006, sont regroupées dans le Code civil. À la clef, la suppression d’une vingtaine de textes disséminés dans différents codes et lois. La mention manuscrite devant être apposée par la caution personne physique est largement simplifiée. Le nantissement de créance se voit doté d’un droit de rétention opposable à une procédure collective et la possibilité de consentir plusieurs nantissements sur une même créance est consacrée.

Le régime du nantissement de comptes titres bénéficie de deux améliorations réclamées par la pratique : le compte de fruits et produits peut être ouvert à tout moment et non plus obligatoirement lors de la constitution du nantissement. Par ailleurs, des nantissements successifs pourront être conclus sur un même compte. Le gage connaît également une série d’innovations. Des sûretés du Code de commerce sont supprimées, comme le gage commercial, le gage de stocks, le nantissement de l’outillage et du matériel d’équipement… En revanche, le gage de droit commun du Code civil voit le jour. De même, le gage de véhicule automobile est incorporé au droit commun. Mais sa publicité doit toujours être effectuée sur un registre tenu par l’autorité administrative (décret à paraître). Le gage pourra porter sur des meubles ayant vocation à être incorporé à des immeubles, en vue de faciliter le financement des équipements d’économie d’énergie (panneaux solaires, turbines d’éoliennes…). Un registre unique des sûretés mobilières va être mis en place.

Deux sûretés propriété sont créées : la cession de créance à titre de garantie, sorte de Dailly pour tous, et la cession de sommes d’argent à titre de garantie, qui n’est autre que la codification du gage-espèces. Enfin, concernant les sûretés immobilières, l’élément nouveau est la suppression du privilège de prêteur de deniers (PPD), remplacé par une hypothèque légale, la HPD. Différence majeure : la HPD prend rang au jour de son inscription, alors que le PPD rétroagissait au jour de la vente de l’immeuble, à condition d’être inscrit dans les deux mois. Le régime fiscal d’exonération de la taxe de publicité foncière reste inchangé.

 

Obligation d’organisation de la gestion du risque informatique

France

Dans le domaine du contrôle interne, l’arrêté du 3 novembre 2014 connaît deux modifications importantes. Le contrôle interne propre à la lutte antiblanchiment et financement du terrorisme est sorti de l’arrêté de 2014 : il fait l’objet d’un régime spécifique issu de l’arrêté du 6 janvier 2021 relatif au dispositif et au contrôle interne en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT) et de gel des avoirs et d’interdiction de mise à disposition ou d’utilisation de fonds ou ressources économiques. En second lieu, un arrêté du 25 février 2021 modifiant l’arrêté du 3 novembre 2014 oblige les établissements à se doter d’une organisation de la gestion du risque informatique.

 

La procédure de sauvegarde adaptée

France

L’ordonnance n° 2021-1193 du 15 septembre 2021 portant réforme du livre VI du Code de commerce et le décret d’application du 23 septembre n° 2021-1218 transposent la directive européenne 20219/1023 du 20 juin 2019 relative aux cadres de restructuration préventive. La procédure de sauvegarde accélérée est profondément modifiée. Quant à la sauvegarde financière accélérée, elle est simplement supprimée.

La nouvelle procédure se caractérise par l’institution de classes de parties affectées par la procédure qui votent le plan de sauvegarde. À défaut, le tribunal conserve la possibilité d’adopter le plan sous certaines conditions. Le plan doit être adopté dans les quatre mois. Cette procédure s’applique aux entreprises de plus de 20 millions d’euros de chiffre d’affaires et 250 salariés ou de plus de 40 millions d’euros de chiffre d’affaires. Elle est facultative en dessous de ces seuils.

La constitution de classes de parties affectées concerne aussi bien la procédure de sauvergarde que la procédure de redressement judiciaire au-dessus de ces seuils. L’ordonnance traite par ailleurs de l’articulation entre le droit des sûretés et les procédures collectives. Le privilège de post money reconnu à celui à celui qui consent un financement en cours de procédure est pérennisé. Une série de dispositions est peu favorable aux créanciers, tels l’interdiction de l’accroissement de l’assiette de la sûreté dès l’ouverture de la procédure (par exemple l’inclusion de nouveaux titres dans le nantissement de compte-titres) ou le renforcement de la protection des cautions personnes physiques, fréquemment chefs d’entreprise, dans le cadre du redressement judiciaire. Enfin, l’article L. 643-8 du Code de commerce établit l’ordre des créanciers en cas de liquidation judiciaire. La réforme est applicable aux procédures ouvertes à compter du 1er octobre 2021.

 

Quelques spécificités avec la crise sanitaire

France

L‘article 13 de la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021 relative à la sortie de crise, complétée par les décrets n° 2021-1354 et n° 2021-1355 du 16 octobre 2021, a instauré une procédure judiciaire simplifiée de « traitement de sortie de crise sanitaire » temporaire pour deux ans. Elle est réservée aux petites entreprises en état de cessation des paiements mais disposant de fonds disponibles pour payer les créances salariales. Le plan doit être adopté dans les trois mois.

Enfin, les prêts participatifs créés par l’article 209 de la loi de finances n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 ont fait l’objet d’un décret d’application n° 2021-318 du 25 mars 2021. Il s’agit de soutenir les fonds propres des PME et ETI dont le chiffre d’affaires 2019 est supérieur à 2 millions d’euros. Ils seront distribués jusqu’à fin 2023. Ces prêts distribués par les établissements de crédit et les sociétés de financement sont remboursables sur huit ans avec un différé d’amortissement de quatre ans. Leur montant est plafonné en fonction du chiffre d’affaires. Ils sont refinancés à hauteur de 90 % par un fonds levant des capitaux auprès d’investisseurs institutionnels. L’État prend en charge 30 % des pertes en capital subies par les investisseurs.

 

Thèmes spécialisés

Crédit

Du côté des clauses abusives

Jurisprudence

France - Europe

La Commission des clauses abusives a publié le 10 mai 2021 une recommandation n° 21-01 relative aux contrats de crédit à la consommation qui identifie 43 types de clauses qui peuvent, selon elle, être qualifiées d’abusives. Certaines concernent toutes les sortes de crédit à la consommation, d’autres sont propres à certains types de contrats.

À noter également, le grand nombre de jurisprudences sur le sujet. Les clauses d’exigibilité anticipée sont passées au crible de la réglementation sur les clauses abusives. Il est jugé que n’est pas abusive la clause prévoyant l’exigibilité anticipée sans préavis en cas de fourniture de renseignements inexacts sur la situation de l’emprunteur (en l’espèce, de faux relevés de compte), dès lors que ces renseignements sont nécessaires à la décision du prêteur (Cass. 20 janvier 2021, n° 18-24.297).

Un autre arrêt interroge la Cour de justice de l’Union européenne sur l’éventuel caractère abusif d’une clause stipulant la déchéance du terme automatique, sans mise en demeure, en cas de retard de plus de trente jours dans le paiement d’une échéance (Cass. 16 juin 2021, n° 20-12.154). Enfin, est admis le maintien partiel d’une clause d’exigibilité anticipée dont seules certaines causes de déchéance du terme sont jugées abusives, alors que d’autres causes, notamment liées à l’inexécution du contrat de prêt sur lesquelles s’était fondée la banque, sont valables (Cass. 2 juin 2021, n° 19-22.455).

Dans l’affaire des prêts en francs suisses « Helvet Immo », pas moins de six arrêts de la Cour de cassation ont jugé, dans les années passées, que les clauses de monnaie de compte et de monnaie de paiement échappent au régime des clauses abusives. Deux juridictions françaises ont néanmoins saisi la Cour de justice de l’Union européenne sur ce sujet. Celle-ci confirme que les clauses incriminées relèvent de l’objet principal du contrat. Elles ne sont donc pas soumises aux règles des clauses abusives dès lors qu’elles sont claires et compréhensibles, ce qui doit être apprécié au cas par cas. Dans le cas où le contrôle des clauses abusives s’appliquerait, la Cour estime que les clauses qui ont pour effet de faire porter le risque de change sans qu’il soit plafonné sur l’emprunteur sont susceptibles de créer un déséquilibre significatif au détriment de ce dernier (CJUE 10 juin 2021, aff. C-776/19 à C-788/19 et aff. C-609/19).

 

Pas de rémunération due par le prêteur en cas de taux négatif

Jurisprudence

France

Un arrêt de la Cour de cassation du 10 mars 2021 (n° 18-24.701 et 18-24.699) confirme la jurisprudence de 2020 mettant fin aux contentieux sur les intérêts négatifs en matière de crédit. La solution est claire : en cas d’évolution négative des indices, le prêteur ne peut être tenu, même temporairement, au paiement d’une quelconque rémunération à l’emprunteur.

 

Inexactitude sur les TEG

Jurisprudence

France

Le contentieux relatif au taux effectif global (TEG) s’est considérablement réduit du fait de la jurisprudence restrictive de la Cour de cassation. Ne peut être sanctionnée que l’inexactitude du TEG entraînant un écart supérieur à une décimale par rapport au taux stipulé. La sanction de la déchéance du droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge, notamment au regard du préjudice subi par l’emprunteur, et non plus l’application du taux d’intérêt légal, est généralisée (Cass. 24 mars 2021, n° 19-14.307 et 19-14.404). Ces solutions s’appliquent, que l’inexactitude provienne du calcul de l’intérêt conventionnel sur la base de 360 jours (Cass. 6 janvier 2021, n° 18-25.865) ou que le taux de période ou sa durée n’ait pas été communiqué à l’emprunteur (Cass. 22 septembre 2021, n° 19-25.316).

 

La condition de la prescription biennale

Jurisprudence

France

La prescription de deux ans de l’article L 218-2 du Code de la consommation s’applique aux actions en paiement en matière de crédit aux particuliers, quels que soient la nature ou le montant des prêts, par exemple à des crédits supérieurs au plafond d’application des règles sur le crédit à la consommation (Cass. 20 janvier 2021, n° 19-20.013, et 2 juin 2021, n° 20-10.10023). La prescription se divise comme la dette elle-même et court pour chaque mensualité impayée à compter de sa date d’échéance. L’action en paiement du capital restant dû se prescrit, quant à elle, à compter de la déchéance du terme qui emporte son exigibilité (Cass. 20 octobre 2021, n° 20-13.661). Enfin, la prescription biennale de l’action du prêteur à la suite de l’exigibilité anticipée du prêt entraîne par voie de conséquence l’extinction de l’hypothèque garantissant le crédit (Cass. 12 mai 2021, n° 19-16.514).

 

Conditions d’octroi du crédit

Jurisprudence

France

Côté jurisprudence, deux décisions méritent d’être citées. La Cour de cassation réaffirme, conformément à la jurisprudence européenne, qu’il incombe au prêteur de rapporter la preuve qu’il a remis à l’emprunteur les documents exigés par la loi. Une mention pré-imprimée suivie de la signature de l’emprunteur par laquelle il reconnaît avoir reçu le document constitue seulement un indice que le prêteur doit corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires (Cass. 8 avril 2021, n° 19-20.980, sur la remise de la fiche d’information standardisée et de la notice d’assurance. Un arrêt précédent a statué sur la remise du bordereau de rétractation).

Le second arrêt participe de l’abondant contentieux relatif au financement des équipements d’énergie renouvelable. La jurisprudence impose au prêteur de ne verser les fonds au vendeur ou prestataire qu’après avoir vérifié la régularité formelle du contrat de vente ou de prestation et sa complète exécution. À défaut, le prêteur serait privé de la restitution du capital en cas d’annulation ou de résolution du contrat de crédit, mais à condition que l’emprunteur ait subi un préjudice en lien avec cette faute, ce qui ne serait cas le cas s’il a reçu l’installation en bon état de fonctionnement (Cass. 8 septembre 2021, n° 20-14.899).

 

Le paiement fractionné plus réglementé

Europe

Concernant le crédit à la consommation, une proposition de directive relative au crédit aux consommateurs du 30 juin 2021 COM (2021) 347 final procède à une refonte de l’actuelle directive 2008/48/CE du 23 avril 2008. Le champ d’application en est élargi notamment aux petits crédits et au paiement fractionné. On relève de manière générale un renforcement des règles. En particulier, l’arsenal informatif est alourdi et des obligations nouvelles sont imposées en matière d’étude de solvabilité. Un agrément est prévu pour les prêteurs qui ne sont pas des établissements de crédit, par exemple les fournisseurs de paiement fractionné.

 

La recommandation du HSCF devient norme

France

Côté crédit immobilier aux particuliers, la recommandation du Haut Conseil de stabilité financière R-HCSF-2021-1 du 27 janvier 2021 relative à l’octroi de crédits immobiliers résidentiels en France deviendra obligatoire à compter du 1er janvier 2022 (décision du 29 septembre 2021). Ce texte instaure un taux d’effort maximal de 35 % et une maturité maximale de vingt-cinq ans. Un pourcentage de 20 % de la production trimestrielle peut déroger à ces mesures. Par ailleurs, il est jugé une nouvelle fois que l’inobservation du délai de réflexion de dix jours est sanctionnée par la nullité du prêt et non par la déchéance du droit aux intérêts (Cass. 6 janvier 2021, n° 19-11.694).

 

Responsabilité en matière de crédit

Jurisprudence

France

La responsabilité en matière de crédit s’organise principalement autour de l’obligation de mise en garde à laquelle est tenu le prêteur. Celle-ci ne peut être invoquée que par un emprunteur ou une caution non avertie. Si la position de gérant de la société cautionnée n’est pas suffisante en elle-même pour qualifier celui-ci d’averti, la prise en compte de l’expérience de la vie des affaires constitue en revanche un critère pertinent (Cass. 5 mai 2021, n° 19-21.648). L’action en responsabilité contre la banque pour manquement au devoir de mise en garde est soumise au délai de prescription de cinq ans, qu’elle soit formée par voie de demande reconventionnelle ou de défense eu fond (Cass. 8 avril 2021, n° 19-12.693). Le point de départ de ce délai pour la caution est le jour où elle a su qu’elle allait être poursuivie (Cass. 8 avril 2021, n° 19-12.741).

 

Assurance emprunteur

Jurisprudence

France

L’assurance emprunteur risque de voir son modèle économique et son régime juridique bouleversés par un texte en cours de discussion au Parlement, au moment où ces lignes sont écrites. La proposition de loi n° 4453 « pour un accès plus juste, plus simple et plus transparent au marché de l’assurance emprunteur » prévoit la faculté de résilier sans frais et à tout moment les contrats d’assurance emprunteur pour les crédits immobiliers. Le texte entrerait en vigueur un an après la publication de la loi et s’appliquerait aux contrats en cours à cette date.

En attendant, notons deux jurisprudences sur le sujet. La banque qui propose à l’emprunteur d’adhérer au contrat de groupe qu’elle a souscrit est tenue de l’éclairer sur l’adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d’emprunteur. En cas de manquement à cette obligation, l’emprunteur a droit à réparation, sans avoir à démontrer que, mieux informé et conseillé, il aurait souscrit de manière certaine une assurance garantissant le risque réalisé (Cass. 17 juin 2021, n° 19-24.467). Cette action en responsabilité est soumise à une prescription de cinq ans à compter du refus de garantie par l’assureur (Cass. 6 janvier 2021, n° 18-24.954).

 

Sûretés

Jurisprudence

France

Dans le domaine des sûretés, la jurisprudence est toujours aussi fournie en matière de cautionnement, les cautions poursuivies faisant flèche de tout bois pour tenter de se soustraire à leur engagement. Plusieurs arrêts ont encore été rendus sur la règle de la proportionnalité entre le montant de l’engagement de la caution et ses biens et revenus, la mention manuscrite et l’information annuelle due par le créancier. Des précisions intéressantes ont été apportées par la Cour de cassation sur l’action paulienne pouvant être exercée par le créancier lorsque la caution a organisé son insolvabilité (Cass. 24 mars 2021, n° 19-20.033). Lorsqu’une hypothèque a été constituée par une personne pour garantir la dette d’autrui, le délai de prescription pour exercer la garantie est de trente ans (Cass. 2 juin 2021, n° 20-12.908).

Le nantissement connaît un sort variable en jurisprudence selon le bien sur lequel il est constitué. Les solutions sont favorables au nantissement de contrat d’assurance vie, tel l’arrêt qui juge que, sauf volonté contraire des parties, le prêteur a droit au paiement de la valeur de rachat tant que le prêt n’est pas remboursé, même si la durée initiale du prêt est dépassée (Cass. 10 mars 2021, n° 20-11.917). En revanche, le nantissement de compte bancaire est privé de toute efficacité par les tribunaux. En témoigne un arrêt de la cour d’appel de Versailles du 14 janvier 2021 (n°RG 19/08059), qui juge que tant que le créancier ne réalise pas sa sûreté, les sommes figurant sur le compte peuvent faire l’objet d’une saisie par un autre créancier. On peut espérer que la réforme des sûretés (voir page xx) conduira à une évolution de la jurisprudence.

 

Comptes et moyens de paiement

Droit au compte et opérations illégales

Jurisprudence

France

En communiquant ses coordonnées bancaires à son partenaire iranien afin que, par l’intermédiaire d’une société chinoise, il soit bénéficiaire d’un virement, le titulaire d’un compte ouvert au titre du droit au compte peut voir son compte résilié par la banque sans préavis, sur le fondement de l’article L 312-I du Code monétaire et financier. Le client a en effet utilisé délibérément son compte pour des opérations suspectées d’être illégales (Cass. 30 juin 2021, n° 19-14.313).

 

DSP2, rien que DSP2

Jurisprudence

Europe

La Cour de justice de l’Union européenne précise que la responsabilité du prestataire de services de paiement (PSP) au titre de l’exécution d’une opération non autorisée par le titulaire du compte relève exclusivement des règles de DSP2. Par conséquent, le client doit respecter le délai de contestation de treize mois prévu par ce texte pour faire valoir son droit à remboursement. Il ne peut pas invoquer une responsabilité de droit commun si le délai de treize mois est expiré (CJUE 2 septembre 2021, aff. C-337/20).

 

Un livre blanc « Données et moyens de paiements »

France

Le 6 octobre 2021, la CNIL a publié un livre blanc relatif aux données et aux moyens de paiement et organisé une consultation publique. Le document comporte huit messages clefs et pourrait déboucher sur un cadre de référence en matière de conformité au RGPD sur le sujet des paiements.

 

Bientôt l’Europe des paiements

Europe

L’Initiative européenne de paiement (EPI), qui réunit actuellement 22 banques en vue de créer une solution de paiement européenne unifiée, a franchi une nouvelle étape en décidant, le 29 novembre 2021, de transformer la société intermédiaire EPI Interim Company en une structure finale dénommée Target Company. La décision sur son financement doit être prise le 22 décembre.

 

Voies d’exécution

Jurisprudence

France

La décision la plus intéressante dans ce domaine concerne l’insaisissabilité en France des biens des banques centrales ou des autorités monétaires étrangères. La Cour de cassation précise que cette insaisissabilité, édictée par l’article L. 153-1 du Code monétaire et financier, est distincte de l’immunité d’exécution dont bénéficient les États étrangers, à laquelle, dans cette affaire, l’État concerné avait renoncé. Elle est en effet instituée, souligne la Cour, afin de garantir le fonctionnement de ces banques et autorités, indépendamment de l’immunité d’exécution reconnue aux États étrangers. Elle justifie une atteinte au droit à l’exécution et au droit de propriété du créancier protégés par l’article 1er, alinéa 1, du protocole additionnel n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, parce qu’elle « poursuit un but légitime en ce qu’elle vise à préserver le fonctionnement d’institutions qui concourent à la définition et à la mise en œuvre de la politique monétaire et à prévenir un blocage des réserves de change placées en France ».

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº863-864
RB