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Revoilà la stagflation mondiale

Créé le

23.03.2022

Qu’est-ce que la stagflation ? La combinaison d’une baisse tendancielle de la croissance réelle et d’une accélération de l’inflation. L’expression de stagflation fait référence aux années 1970. Une période où l’on sortait des 30 glorieuses et où l’on croyait encore à un arbitrage inflation/croissance. Et où l’on avait dès lors du mal à imaginer une longue période de faible croissance et de forte inflation. La croissance économique (en volume) des pays de l’OCDE s’est en effet établie à 2 % en 1974-1981 contre 5,1 % de 1960 à 1973. Mais dans le même temps, la hausse des prix à la consommation s’établissait à 10,1 % sur la même période.

La grande inflation des années 1970 a été tirée et entretenue par plusieurs chocs d’offre négatifs : les deux grands chocs pétroliers, bien sûr, mais aussi le net ralentissement des gains de productivité, les fortes dévaluations issues du flottement généralisé des changes de 1971-1973, de nombreuses initiatives protectionnistes… Puis elle s’est diffusée avant de persister sous l’effet des mécanismes d’indexation des salaires, de syndicalisation élevée, de la persistance de structures oligopolistiques et d’un degré d’ouverture limité aux échanges. Sans oublier une certaine passivité de la banque centrale américaine (Fed) avec également des difficultés de transmission de la politique monétaire.

La Fed beyond the curve

Il est surtout intéressant de regarder en ce qui concerne les actifs financiers les performances des États-Unis. À cette époque les marchés de capitaux de l’Europe continentale étaient en effet beaucoup moins développés. Si l’on prend la période de janvier 1974 à octobre 1982, la performance réelle des actions est nulle en termes réels (9 % en termes nominaux). Le marché obligataire et du crédit fut évidemment pénalisé par la hausse des taux nominaux, sanction logique à l’époque d’une Fed « behind the curve », jusqu’à la politique de quantitative tightening de Paul Volcker en 1979-1982. La performance réelle du crédit Investment Grade fut aussi quasi nulle (8 % en terme nominaux) de même que le cash. Les obligations souveraines à 10 ans ont eu une performance réelle négative de -2 % (7 % en termes nominaux). Si l’on voulait être complet sur les actifs financiers, on pourrait même considérer que la performance réelle était nulle/négative depuis… 1966, date de l’intensification de la guerre du Vietnam, des pressions de Lyndon Johnson sur la Fed et donc déjà de la montée de l’inflation à la fin des années 1960.

Et le vainqueur est…

S’agissant des actions, la période de stagflation fut marquée par une baisse des marges, avec une non-répercussion de la hausse des coûts de production sur les prix de vente, mais aussi des profits réels pour les entreprises. Le marché actions fut aussi affecté par une baisse des valorisations et une montée des taux longs nominaux. Au total, on enregistra une baisse réelle (ou au mieux une stagnation réelle) de toutes les classes d’actifs financiers pendant presque 10 ans, même plus de 15 ans si l’on remonte à 1966 (cf. graphique).

On le sait, les meilleures performances réelles positives furent enregistrées par les actifs physiques, l’or, le pétrole et les marchés immobiliers. Concernant l’immobilier, ce fut le cas autant aux États-Unis qu’en France. Une leçon d’histoire valable pour l’avenir ?

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº867