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Évolution

Adopter le « mieux digital » pour accroître son activité

Créé le

15.02.2022

Avant-hier, le digital était « nice to have ». Hier, c’était l'heure du « plus digital ». Le temps est venu de faire du « mieux digital », avec des objectifs avoués de produit net bancaire. Voici les pistes creusées par les banques européennes.

Pour de nombreux secteurs économiques, la crise sanitaire – et les restrictions de déplacements qui l’ont accompagnée – auront eu au moins un mérite : provoquer une accélération de la montée en performance digitale, jusqu’à mettre le numérique au centre de la relation client. Ce canal devenant parfois le seul moyen de relation avec ce dernier, il est même passé du statut de « nice to have » à celui d’« absolutely must have »

S’agissant du secteur bancaire, le défi remonte déjà quelques années avant le Covid. Il s’est résumé dans une première étape à la digitalisation des opérations les plus courantes : relever le niveau de son compte, obtenir un premier niveau d’information sur la gamme de produits et services de l’établissement, voire à démarrer l’ouverture d’un compte. À noter que, lors de la première campagne de notation conduite par D-Rating en 2017, cette dernière opération n’était possible via l’application mobile que pour 8 % seulement des banques de réseau étudiées… Contre 67 % chez les néobanques.

Une course derrière les pure players

Pour les acteurs historiques, particulièrement, l’étape suivante a été celle du « plus digital ». Il s’agissait cette fois de combler le gap les séparant des nouveaux pure players. D’abord, en améliorant les parcours de souscription. En 2021, avoir la possibilité d’ouvrir un compte via un parcours 100 % digital est la norme en Europe. Ensuite, en déployant de nouveaux services sur les sites et les applications bancaires. Quitte, parfois, à sacrifier pour cela la qualité d’exécution !

Davantage de canaux de communication ont certes été mis en place. Mais les plages de disponibilité sont limitées si l’intervention d’un collaborateur est nécessaire. En particulier, les chats étaient parfois désactivés le jour de fermeture des agences bancaires pour prioriser le canal téléphonique sur les centres de contact. En cas de recours à l'automatisation, un autre problème se pose : un niveau de pertinence limité. Dans sa campagne 2020, D-Rating relevait par exemple qu’à peine plus de la moitié (56 %) des chatbots proposés par les 70 banques étudiées proposaient des réponses pertinentes.

Le Covid en guise d'électrochoc

Et puis est arrivé le Covid, l’impossibilité d’accéder aux agences bancaires, et la nécessité – pour prévenir l’attrition et préserver autant que possible les résultats des banques dans une économie tournant au ralenti – d’aller vers un « full digital banking » offrant au client une totale autonomie. En étudiant les comptes 2020 des établissements du panel, D-Rating observait que la capacité à continuer à générer du produit net bancaire (PNB) était directement corrélée à trois éléments clefs :

– le niveau d’usage des canaux digitaux ;

– la qualité et la profondeur de ces derniers ;

– la capacité à continuer à accompagner le client dans la réalisation de ses projets complexes, comme monter un crédit immobilier, souscrire à une assurance vie ou contracter une assurance habitation.

Rendre l'expertise accessible online

C'est pourquoi, après le « plus digital », les banques sont maintenant entrées dans l’ère du « mieux digital ». L’ambition est alors de mettre le numérique au service de la génération de PNB. Dans sa campagne de notation 2021, cela a conduit D-Rating à distinguer instant support et expert support. L’instant support, c’est la disponibilité permanente de moyens de réponse immédiate à des préoccupations urgentes comme, par exemple, la perte d’une carte de paiement. Et l’expert support, la capacité de bénéficier d’un accompagnement qualifié sur des problématiques complexes ou nécessitant une bonne connaissance de la situation du client.

Sur les offres basiques, par exemple, les banques ont commencé à proposer la souscription de cartes bancaires via l’application mobile (68 % des banques évaluées) et la souscription des comptes Junior/Famille, un moyen de conquérir puis fidéliser la clientèle jeune. Avec ce choix, elles s’évitent les coûts d’acquisition qu’entraînent les campagnes de communication ou la sponsorisation des nouveaux clients (23 %). Des écarts significatifs demeurent toutefois à la fois d’un pays à l’autre, mais aussi entre services (voir graphique).

Sur des produits plus engageants, la signature électronique du contrat dans l’espace authentifié web est maintenant possible dans 84 % des cas pour l’ouverture d’un compte épargne, 69 % pour un prêt personnel et 68 % pour l’assurance habitation [1] . Initier une souscription via l’app est possible dans 85 % des cas pour le compte épargne, 60 % pour le prêt personnel et 67 % pour l’assurance habitation [2] .

Sur ces produits ou d’autres produits plus complexes, la capacité de faire appel à de l’expertise via des canaux de contact dédiés (près des deux-tiers des banques le permettent pour un crédit immobilier) peut faciliter la finalisation du parcours et, donc, l’acte de souscription. Certaines banques travaillent également la possibilité de reprise du parcours client en ligne par le conseiller dans une logique cross canal.

En route vers le beyond banking ?

Parmi les évolutions que l'on peut anticiper pour 2022, deux sont déjà perceptibles :

– la capacité à proposer des produits et/ou à gérer des comptes en cryptomonnaies, mais cette offre reste marginale à ce jour

– le secteur ne restera pas à l’écart de la thématique environnementale. Les calculateurs d’empreinte carbone font déjà partie des services proposés par un quart des banques allemandes. Certaines néobanques, comme Banx en Belgique, Helios ou Green Got en France, placent le green au centre de leur promesse…

Après avoir été vécue comme une contrainte, l’ouverture (partielle) des systèmes d'information imposée par la directive DSP2 pourrait au final offrir l’opportunité d’un élargissement vers le beyond banking. Ainsi, chez certains acteurs comme KBC ou Intesa Sanpaolo, un utilisateur peut tester l’application mobile de la banque avec un compte rattaché à un autre établissement avant même de devenir client.

Des partenariats pour enrichir l'offre

En cela, le retail banking suivrait l’exemple du SME banking. Dans sa première campagne de notation de la banque des pros, D-Rating notait l’agilité avec laquelle ces dernières étendent leur portefeuille de services disponibles au travers de partenariats passés avec des acteurs tiers, offrant ainsi des services qu’ils n’opèrent pas en direct. Les plus performantes parviennent à rendre cela totalement transparent pour le client final. Et pour certains acteurs, l’offre de fonctionnalités digitales va bien au-delà du pur périmètre bancaire : gestion des notes de frais, des factures, boîte à outil pour la création de l’entreprise, etc.

Les (méga) financements obtenus par Spendesk ou Checkout.com attestent que les financiers semblent faire le pari d’une montée en puissance de ce schéma de fonctionnement. Anytime (Orange Bank) s’est ainsi allié à Easyblue, Mansa, Dimpl, Edebex, Smile&Pay, SumUp et Alma pour proposer des services d’assurance, de crédit de trésorerie, de garantie des impayés, de factoring, de fractionnement des paiements ou encore de fourniture de TPE.

Ce mouvement pourrait-il se propager vers la banque de détail et permettre le développement du beyond banking sur le marché des particuliers ? À voir. Mais il faut savoir qu’en Belgique, les clients de KBC bénéficient depuis quelques jours d’un fil d’informations économiques et financières, à l'image de ce que Boursorama propose de longe date à ses clients… mais aussi des meilleurs extraits du championnat belge de football.

 

1 Pour les banques ayant l’offre en portefeuille.
2 Idem.

À retrouver dans la revue
Revue Banque Nº866
Notes :
1 Pour les banques ayant l’offre en portefeuille.
2 Idem.